Optimisation des dopages en vue de l'obtention d'une cavité monolithique et monofréquence

Il nous est apparu intéressant pour des applications de vélocimétrie (effet Doppler) de concevoir un laser monofréquence et monolithique. L'objet du chapitre suivant est de calculer, à partir de notre modèle, les dopages optimaux en ions erbium et ytterbium pour réaliser un tel laser.

Une cavité monolithique et monofréquence est une cavité où tous les miroirs sont déposés sur le matériau actif et dont la longueur de cavité assure l'oscillation d'un unique mode (voir figure 7-1).

figure 7-1 : Schéma de principe d'une cavité laser monolithique.

Pour obtenir un fonctionnement monofréquence d'un laser monolithique 4 niveaux, il suffit que l'espacement en longueur d'onde () entre les modes de la cavité laser soit supérieur à la largeur à mi-hauteur () du profil de gain (voir figure 7-2). En effet, dans un laser type 4 niveaux le gain étant très important, il faut une différence très importante entre 2 modes pour qu'ils n'oscillent pas tous les deux simultanément. En revanche, dans un laser type 3 niveaux, du fait de l'absorption importante à la longueur d'onde laser, le gain potentiel est très faible comparé à celui d'un laser type 4 niveaux. Il faut donc appliquer un critère moins contraignant. Nous avons choisi une différence de gain de 10 % par rapport au gain maximal. Pour un laser type 3 niveaux, est donc la largeur à 90 % de la courbe de fluorescence.

figure 7-2 : Profil de gain et modes de la cavité laser en fonction de la longueur d'onde.

Pour le matériau que nous utilisons 3 nm (voir paragraphe 2.6.1). est relié à la longueur de la cavité par l'expression : où est la longueur d'onde du faisceau résonnant dans la cavité, n l'indice du matériau composant la cavité et L la longueur de la cavité. On a donc : avec =1,53 µm, n=1,53 et =3 nm. Nous avons donc choisi L=200 µm.

On a donc une longueur d'absorption (Labs) d'environ 400 µm. Pour obtenir une absorption de 90 % à 975 nm, le matériau doit présenter un coefficient d'absorption de , ce qui correspond à un dopage en ytterbium . Le dopage maximal réalisable dans cette matrice est [29]. Il apparaît donc nécessaire de simuler le fonctionnement du laser en vue de l'optimisation des différents dopages. Nous avons donc simuler le fonctionnement du laser pour différents dopages avec Ner+Nyb=2,5.1021 cm-3 et Rp=1 (voir figure 7-3). Les puissances de pompe au seuil ainsi que les rendements différentiels externes pour les différents dopages simulés sont présentés dans le tableau 7-1.

 

Ner=0.05

Nyb=2,45

Ner=0.1

Nyb=2,4

Ner=0.2

Nyb=2,3

Ner=0.4

Nyb=2,1

Ner=0.5

Nyb=2

Seuil (mW)

158

26

34

59

73,5

Pente (%)

14,3

27

27,8

24,5

22,7

tableau 7-1 : Récapitulatif des seuils et pentes pour différents dopages (1021 cm-3)en erbium et ytterbium.

figure 7-3 : Puissance laser en fonction de la puissance de pompe pour différents dopages en erbium et ytterbium.

Nous avons donc choisi de prendre Ner=0,2.1021 cm-3 et Nyb=2,3.1021 cm-3.

Un paramètre important du fonctionnement du laser est le coefficient de réflexion du faisceau de pompe par le miroir de sortie. La variation de la puissance laser en fonction de la puissance de pompe pour différentes valeurs de ce coefficient est représentée figure 7-4.

figure 7-4 : Puissance laser en fonction de la puissance de pompe pour différents coefficients de réflexion du faisceau de pompe sur le miroir de sortie pour les dopages choisis.

 

Rp=1

Rp=0,75

Rp=0,5

Rp=0,25

Rp=0

Seuil (mW)

33,5

38

45

54

67

Pente (%)

27,8

24,4

21

17,4

14

tableau 7-2 : Puissance de pompe au seuil et pente en fonction du coefficient de réflexion du faisceau de pompe sur le miroir de sortie pour les dopages choisis.

En passant de Rp=1 à Rp=0, le seuil est multiplié par 2 et la pente est divisée par 2. Il apparaît donc très important pour le fonctionnement de ce laser que ce coefficient soit le plus élevé possible.

Les caractéristiques du laser pour obtenir une cavité monolithique et monofréquence de rendement de conversion maximal sont présentées .

figure 7-5 : Schéma du laser monolithique et monofréquence

Nous avons donc réussi à l'aide du modèle mathématique présenté au chapitre 2 à " dimensionner " un laser monolithique et monofréquence (" microchip "). Nous avons demandé à la société Kigre Inc. de nous fabriquer le matériau avec les dopages voulus. Ce matériau est celui présenté dans l'analyse spectroscopique du chapitre 1. Nous n'avons pas eu le temps de faire polir et traiter ce matériau de façon à l'essayer en cavité laser. Mais le groupe laser du LETI de Grenoble a réalisé un laser similaire (a priori les dopages sont peu différents de ceux que nous avons calculé) dont les résultats sont présentés en référence [30]. En revanche, nous avons réalisé des lasers de ce type avec un matériau dont les propriétés thermiques étaient très mauvaises mais dont les dopages en ions erbium et ytterbium étaient élevés (Ner = 5.1019 cm-3 Nyb = 4.1021 cm-3). Nous avons réalisé avec ce matériau deux lasers monolithiques dont les épaisseurs étaient respectivement 260 et 460 µm. Les courbes de puissance laser de sortie en fonction de la puissance de pompe issue d'un laser à saphir dopé au titane sont présentées sur la figure 7-3.

figure 7-6 : Puissance laser en fonction de la puissance de pompe pour deux lasers monolithiques.

Nous avons observé une émission monofréquence en employant l'échantillon de 260 µm d'épaisseur et pour une puissance de pompe inférieure à 150 mW. Au delà de cette puissance de pompe le laser devient multimode transverse et longitudinal. La longueur d'onde centrale de ce mode n'est pas stable et varie avec les effets thermiques. Nous n'avons pas obtenu de fonctionnement monofréquence avec le laser de 460 µm de longueur de cavité. Ce laser est multimode transverse pour une puissance de pompe supérieure à 200 mW. Par contre nous avons obtenu une puissances laser maximale de 100 mW, ce qui est relativement élevé compte tenu de l'épaisseur du matériau actif.

Il est aussi possible de réaliser un laser monolithique déclenché par commutation des pertes grâce à l'utilisation d'un absorbant saturable. Les matériaux solides pouvant être utilisés comme absorbant saturable à 1,53 µm ne sont étudiés que de manière très récente. Dans le chapitre suivant nous nous proposons de recenser quelques matériaux potentiels pour cette utilisation.

Chapitre suivant

Retour au sommaire