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Annexe 1 : Détermination expérimentale des caractéristiques thermodynamiques

Plan

1. Détermination expérimentale des coefficients thermoélastiques et des équations d’état
1.1. Cas des solides et des liquides
1.2. Cas des gaz
2. Calorimétrie
2.1. Mesure des capacités calorifiques
2.2. Chaleurs latentes de changement de phase

1. Détermination expérimentale des coefficients thermoélastiques, des équations d’état

1.1. Cas des solides et des liquides

Nous ne décrirons pas les appareillages utilisables mais invitons le lecteur intéressé à se reporter à des ouvrages spécialisés.

Pour ce qui est de la connaissance du coefficient de dilatation à pression constante des solides, on prend des solides en forme de fil et on mesure le coefficient de dilatation linéaire à pression constante 

Le coefficient de compressibilité isotherme s’obtient à partir des modules de Young, Poisson et/ou de cisaillement mais ceci nécessite des connaissances sur les contraintes dans les solides.

Pour ce qui est de la connaissance du coefficient à pression constante des liquides, la mesure se fait directement à partir de l’expérience mise au point par Dulong et Petit ou à l’aide d’un dilatomètre à tige.
La mesure du coefficient de compressibilité isotherme pour les liquides se fait directement dans des piézomètres à capillaire.

Remarque : on ne mesure pas le coefficient b d’augmentation de pression à volume constant parce qu’il est très difficile de faire subir à un liquide ou un solide une transformation isochore.

Equations d’état des solides et des liquides

Pour les solides et les liquides, les coefficients a et cT sont faibles (en première approximation, on les considère comme indilatables et incompressibles).
est une équation d’état habituelle dans des limites de température et de pression à préciser pour chaque corps.
Les liquides, qui font partie de l’état fluide, obéissent, aussi, à des équations d’état de type Van der Waals que nous verrons avec l’étude des gaz

1.2. Cas des gaz
 
Les premières expériences de compressibilité isotherme des gaz, dans des domaines de pression très limités ne dépassant pas quelques atmosphères, ont été faites au 17ème siècle par Mariotte en France et par Boyle en Angleterre.
Plusieurs expérimentateurs (Regnault, Andrews, Cailletet et Amagat) ont repris ces études au 19ème siècle dans des domaines de pression de plus en plus élevés.
Kamerlingh Onnes à Leyde a étendu les mesures au domaine des basses températures.

Ces mesures ont été reprises au 20ème siècle avec une précision accrue sur tous les gaz connus dans des domaines de température extrêmes et pour des pressions atteignant 1000 atmosphères.
De longues séries de mesures systématiques ont été faites dans deux laboratoires spécialisés : en Europe celui de Van Der Waals à Amsterdam sous la direction de Michels et aux Etats -Unis au laboratoire du Massachusetts Institute of Technology sous la direction de Beattie.
Nous présentons, à titre d’exemple, une série de résultats en coordonnées d’Amagat p, pV pour le diazote.
 
Au-dessous d’une température (-147 °C pour le diazote) les courbes sont interrompues car le gaz se liquéfie. Cette température est appelée température critique et notée TC .
Une autre température particulière apparaît, la température de Mariotte TM , où les courbes sont horizontales pour p = 0 ( pour le diazote).
Pour des températures supérieures à la température de Mariotte, les pentes pour p = 0 sont positives, elles sont négatives dans le cas contraire.
Pour le gaz parfait, limite de comportement de tous les gaz réels lorsque la pression devient nulle, les courbes sont horizontales quelle que soit la température. Un gaz réel se rapproche au mieux du comportement du gaz parfait à sa température de Mariotte. 

Equations d’état des gaz

Il n’existe pas d’équation universelle rendant compte des courbes ci-dessus.
Pour des valeurs faibles de p, nous devons retrouver l’équation d’état des gaz parfaits pV=nRT

Des équations classiques sont donc :

La validité de ces équations dépend, pour la précision voulue, essentiellement du domaine de variation de la pression.
Ainsi jusqu’à 2 atmosphères, et même 10 ou 20, on utilise l’équation d’état des gaz parfaits.

Covolume
L’équation  s’écrit 
Si la pression augmente énormément à une température donnée, le volume V tend vers la valeur B(T) = nb(T) qui, suivant l’hypothèse atomique, représente le volume occupé par les molécules du gaz " entassées " les unes sur les autres. Ce volume limite est appelé covolume.
Compte tenu de cette interprétation, il est logique que b soit pratiquement indépendant de la température.

Equation d’état de Van der Waals
 
Dans un fluide réel, les interactions entre molécules ne sont plus négligeables et une molécule frappant une paroi est ralentie à l’instant du choc par la présence des autres molécules toutes situées d’un même coté.
Ainsi le choc sera moins important que dans le cas du gaz parfait. Le terme p, représentant la pression dans l’équation d’état des gaz parfaits, doit être remplacé par p + pp est la pression du gaz réel et p un terme devenant nul lorsque la pression tend vers 0 c’est à dire lorsque le comportement du gaz réel tend vers celui du gaz parfait.

Ainsi, une équation d’état assez générale pour un fluide réel est 

Ainsi dans l’équation d’état de Van der Waals, et on obtient  avec(résultats expérimentaux).
Cette équation de Van der Waals interprète la température de Mariotte.

Pour , l’équation de Van der Waals s’approche au mieux de l’équation d’état des gaz parfaits.
Elle interprète aussi la température critique (chapitre 2).

On utilise d’autres équations d’état de type Van der Waals, par exemple
Diétérici  ; Berthelot  ;
Clausius 

Les équations de Van der Waals, Diétérici, Berthelot ou Clausius peuvent, dans certaines limites, s’appliquer aux liquides.

2. Calorimétrie

La calorimétrie a pour objet la mesure des capacités calorifiques et des chaleurs latentes de changement d’état.

2.1. Mesure des capacités calorifiques

2.1.1. Méthodes de mesure pour les solides, les liquides

En réalisant une transformation isobare, on détermine expérimentalement Cp . On calcule CV à partir de .
En fait les écarts relatifs  restent faibles, 5% pour l’aluminium, 4% pour l’or, 3% pour le cuivre et l’argent, ... de l’ordre de grandeur des erreurs de mesures.

La méthode des mélanges
 
Un vase est rendu pratiquement adiabatique par une enveloppe isolante (ou un système d’isolation complexe). Un tel système est appelé calorimètre adiabatique. On y introduit une masse d’eau de capacité calorifique massique à pression constante  .
Soit  la température initiale de l’eau et du vase supposés en équilibre thermique. Un corps solide de masse M est extrait d’une étuve où il était en équilibre à température  (en général, on choisit ).

On plonge le solide de capacité calorifique massique à pression constante  dans le calorimètre le plus rapidement possible et on referme le couvercle.
On agite afin d’atteindre un équilibre à température finale  au plus vite.
Soit m la masse d’eau qui échangerait d’un point de vue thermique comme le vase et les accessoires (agitateur, capteur de température).

La transformation est irréversible, isobare à la pression  de l’environnement (le plus souvent,).

Pour le système, corps solide + calorimètre, la quantité de chaleur, donc la variation d’enthalpie, est nulle.

L’enthalpie est une fonction d’état, sa variation ne dépend que des états initial et final.

soit 

Cette méthode nécessite la mesure préalable de m qui pourra être faite par la méthode électrique exposée ci-après ou en faisant une expérience préalable avec une masse m’ d’eau à température connue à la place du solide.

La méthode électrique

Particulièrement adaptée pour les liquides, elle consiste à chauffer le liquide enfermé dans le calorimètre adiabatique à l’aide d’une résistance électrique. La connaissance de l’énergie électrique fournie et de l’élévation de température permet la mesure de la capacité calorifique.

V : tension aux bornes de la résistance ; I : courant électrique ; m : masse du liquide ;  capacité calorifique massique à pression constante du liquide ; m : valeur en eau du calorimètre; : capacité calorifique massique à pression constante de l’eau ; DT : élévation de température.

Remarques :
- un calorimètre n’est jamais parfaitement adiabatique (des corrections sont nécessaires faisant appel aux transferts thermiques),
- dans les microcalorimètres, on n’empêche pas les pertes thermiques, on les favorise mais on en tient compte avec précision,
- il s’agit, sur l’intervalle de température, des valeurs moyennes des capacités calorifiques d’où l’intérêt de travailler pour des écarts de température les plus faibles possibles,
- en Transferts Thermiques, d’autres méthodes existent (hors programme).

2.1.2. Méthodes de mesure pour les gaz

Ces mesures sont difficiles en raison de la faiblesse des masses volumiques des gaz et de l’obligation de les enfermer dans des calorimètres dont la capacité calorifique est souvent plus importante que celle du gaz.
On mesure  et l’on déduit  soit de la formule , soit de la mesure de.
Une méthode de mesure de  d’un gaz est connue sous le nom de méthode du courant stationnaire. Elle est adaptée aux liquides.
Une méthode de mesure de g est connue sous le nom d’expérience de Clément et Desormes.
Ces deux méthodes sont étudiées en Travaux Pratiques.

Un autre processus de mesure de g porte le nom de formule de Reech.
Nous avons introduit le coefficient de compressibilité isotherme, nous introduisons celui de compressibilité adiabatique  et remarquons que  en un même état.

Ainsi 
 
Traçons dans un diagramme V, p (diagramme de Clapeyron) l’isotherme passant par le point A0 de coordonnées (p0 , V0). Les dérivées  représentent l’inverse de la pente de ces courbes et on obtient :

En un même point, la pente de l’adiabatique, dans un diagramme V, p, est toujours plus accentuée que celle de l’isotherme.

2.1.3. Résultats

Cas des solides

Le tableau ci-dessous donne la capacité calorifique massique et molaire à pression constante pour différents corps simples à température et pression ordinaires ainsi que les masses molaires M

 
Be
B
C diamant
Al
P blanc
Fe
Cu
Ag
Sb
Pb
M en g
9
10,8
12
27
31
55,8
63,5
108
122
207
1,63
1,0
0,50
0,88
0,79
0,46
0,39
0,23
0,21
0,13
14,7
10,8
6,0
23,7
24,6
25,6
24,7
24,8
25,5
26,8
On constate, sauf pour les éléments légers tels que Be, B et C, que la capacité calorifique molaire est à peu près  (loi de Dulong et Petit, voir chapitre 2)
 
En fait  varie avec la température (fonction croissante) et, pour tous les corps, tend vers 0 si la température tend vers 0.
Si la température est suffisante,  atteint une valeur limite autour de 3R. Pour les éléments légers aux températures ordinaires, la valeur limite n’est pas atteinte.

 
 
Certaines substances solides présentent plusieurs structures cristallines (on dit aussi plusieurs variétés allotropiques) et, à l’intérieur de l’état solide, il y a changement de phase ou d’état.
L’expérience montre que  dépend de la structure cristalline : lors du passage d’une variété allotropique à une autre, les propriétés physiques subissent des discontinuités.
La mesure de  est un excellent moyen de mettre en évidence les transitions de phase de l’état solide.

Cas des liquides
 
Il n’y a pas de loi simple. Pour de nombreux liquides, on trouve un  de l’ordre de 2000 j.kg-1.K-1 exception faite de l’eau dont la valeur est double. Cette propriété, jointe au fait que c’est un produit bon marché, fait de l’eau un fluide caloporteur (porteur de chaleur) de grand intérêt, très employé dans les circuits de refroidissement des moteurs, dans le chauffage central, dans les machines thermiques, ...

Cas des gaz

Le tableau ci-après et les courbes représentées rassemblent les principaux résultats.
 
 
CpM pour 1 atmosphère
CVM pour
CpM - CVM
g =CpM / CVM
 
300 K
600 K
1200 K
1800 K
1 atm, 300 K
 
 
 
 
monoatomique He
20,6
20,6
20,6
20,7
12,5
8,11
~5/3
monoatomique Ar
20,8
20,8
20,9
20,9
12,5
8,32
~5/3
diatomique O2
29,3
32,1
35,7
37,3
21,0
8,32
~1,4
diatomique N2
29,1
30,3
33,7
35,6
20,7
8,36
~1,4
diatomiqueH2
28,8
29,3
31,0
33,5
20,4
8,40
~1,4
autre gaz H2O  
36,3
42,2
49,7
     
autre gaz CO2
37,1
47,2
56,4
59,8
28,4
8,65
~1,3

Commentaires : Les résultats sont donnés pour une pression atmosphérique normale pour laquelle, en première approximation, les gaz réels ont un comportement de gaz parfait.
Les courbes traduisent les évolutions de  avec la température, des différences apparaissent avec l’atomicité.
La valeur de  est égale à R quelque soit le gaz.
A la température T = 0 K, la valeur de  est nulle. Elle évolue très rapidement (entre 0 et 1K) vers la valeur  quelque soit le gaz.
Les gaz monoatomiques gardent cette dernière valeur quelque soit la température.
Les autres gaz subissent deux évolutions pour , l’une autour de 150 K, l’autre autour de 1500 K.
Pour les diatomiques,  atteint la valeur , puis . Pour une atomicité supérieure, les résultats sont plus complexes. Ils dépendent de la forme de la molécule et de son atomicité. On atteint d’abord , puis une valeur plus élevée.

2.2. Chaleurs latentes de changement de phase

2.2.1. Définition
 
A pression constante, la variation d’enthalpie est égale à la quantité de chaleur échangée dans la transformation. 

On appelle chaleur latente (massique ou molaire) de changement de phase d’un corps pur à la température T la variation d’enthalpie (de l’unité de masse ou d’une mole) de ce corps passant d’un état (solide, liquide ou gazeux) à un autre état.

La notation habituelle pour les chaleurs latentes est L. Ainsi  , la variation d’enthalpie pour aller de l’état 1 à l’état 2 est égale à la quantité de chaleur échangée sur l’isobare.

2.2.2. Mesure des chaleurs latentes

Chaleur latente de fusion

On utilise un calorimètre adiabatique dans lequel est maintenu à une température constante  légèrement supérieure à la température de fusion  du corps à étudier. On y introduit une masse m de ce corps à une température  légèrement inférieure à  (le corps est donc en phase solide) ; on maintient la température du calorimètre constante à l’aide d’une résistance immergée dans le calorimètre et parcourue par un courant électrique réglable.

, si Q est la quantité de chaleur fournie par effet Joule,  les capacités calorifiques massiques du corps à l’état solide et liquide et  la chaleur latente massique de fusion du corps.

Chaleur latente de vaporisation

Appareil de Richards

Un vase Dewar est traversé par un tube T ouvert à ses deux extrémités. Ce tube se raccorde à un serpentin S plongé dans un calorimètre adiabatique. Le serpentin aboutit à un réservoir de condensation R et communique avec l’atmosphère par le tube A . L’ébullition du liquide placé dans le vase Dewar a lieu ainsi sous la pression atmosphérique.
Des gouttes liquides peuvent provenir d’une légère condensation qui se produit dans la vapeur en montant dans le vase Dewar. Elles sont vaporisées à nouveau lorsqu’elles traversent le fond dans le tube T et la vapeur arrivant dans S est sèche.
L’égalité de température entre le calorimètre et l’enceinte E est obtenue en faisant tomber de l’acide dans la solution de soude contenue dans E.
L’appareil est entièrement clos et la pression intérieure est obtenue grâce à une atmosphère artificielle (réservoir de 600 litres pouvant supporter des pressions inférieures à 20 atmosphères). Un robinet R permet de mettre la chaudière en communication soit avec un condenseur C, soit avec un serpentin de condensation S.
Au début, la chaudière communique avec le condenseur et on chauffe le liquide (eau) jusqu’à ébullition ; les vapeurs viennent se condenser dans C.

Quand la distillation est devenue régulière, on met la chaudière en communication avec le serpentin. La vapeur sèche qui arrive s’y condense et quand l’expérience a duré assez longtemps, on remet la chaudière en communication avec le condenseur, puis on recueille avec le robinet r l’eau condensée en S.
Désignons par m la masse du liquide condensé,  sa capacité calorifique massique,  sa chaleur latente de vaporisation sous la pression considérée à la température  et  la valeur en eau du calorimètre dont la température initiale est  et la température finale .

Le bilan énergétique s’écrit : 

Cette méthode se prête très facilement à la mesure des chaleurs de vaporisation.
 
On produit la vaporisation par le passage d’un courant d’intensité I dans une résistance R immergée dans le liquide.
Si, pendant le temps , on vaporise, en régime permanent à la température , une masse de liquide m, on a l’équation .
La vaporisation est produite dans une enceinte close A, très robuste. La vapeur se dégage par un ajustage muni d’un robinet R. Elle se condense d’abord dans un condenseur auxiliaire jusqu’à ce que l’on obtienne un régime permanent. La vapeur est ensuite condensées dans C, recueillie par le robinet r’ et pesée.
Soit m la masse du liquide vaporisé, m’ celle de la vapeur qui est sortie de la chaudière (que l’on a recueillie par condensation),  les volumes massiques du liquide et de la vapeur. 

L’augmentation de volume  produite par la vaporisation est égale au volume de vapeur sorti de la chaudière ð.
m diffère d’autant plus de m’ que l’écart  est plus faible c’est à dire que l’on s’approche de la température critique.
Le tableau ci-après donne les valeurs pour l’eau.
 
Températures
1,673
0,1272
0,02162
0,00500
0,00450
0,00323
0,001043
0,001156
0,001404
0,00223
0,00238
0,00323

2.2.3. Résultats

Chaleur latente de fusion

Sous la pression atmosphérique, pour différents corps :

Chaleur latente de vaporisation
 
Les chaleurs latentes de vaporisation diminuent avec la température et atteignent une valeur nulle au point critique puisque phases liquide et gazeuse sont identiques.
On utilise souvent des lois empiriques du type dans un intervalle de température.

Ainsi pour l’eau entre 100 et 200 °C

Nous donnons ci-après quelques chaleurs latentes massiques de vaporisation exprimées en kj/kg sous une pression d’un atmosphère.

Ammoniac 1425 ; Benzène 393 ; Dioxyde de Carbone 594 ; Dioxyde de Soufre 397 ; Eau 2253 ; Ethanol 903

L’importances des valeurs des chaleurs latentes et, plus particulièrement, de celles de vaporisation justifie l’utilisation des changements de phase dans beaucoup de machines thermiques.

Les chaleurs latentes de fusion, de sublimation et de vaporisation sont positives, celles de solidification, de condensation à l’état solide et de condensation à l’état liquide sont respectivement égales et opposées.