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Chapitre 4 : Structure de la matière

Plan

1. Introduction : gaz, liquide, solide
2. L’hypothèse atomique (ou moléculaire)
3. Les deux états de la matière : l'état désordonné et l'état ordonné
3.1. Les états désordonnés
3.1.1. Le Gaz
3.1.1.1. Agitation au niveau microscopique
3.1.1.2. Interprétation microscopique de la pression
3.1.1.3. Mélange idéal de gaz parfaits
3.1.1.4. Facteur de Boltzmann. Raréfaction de l'air
3.1.1.5. Température cinétique. Equipartition de l'énergie. Energie d’un gaz parfait
3.1.2. Le liquide
3.1.3. Le solide amorphe
3.2. L'état ordonné : le solide cristallisé
4. Changements de phases (d’état) des corps purs
4.1. Introduction
4.2. Observation courante
4.3. Equilibre liquide-vapeur
4.4. Equilibre liquide-solide, équilibre solide-gaz
4.5. Remarque


Les disciplines scientifiques tels que la Physique, la Chimie, les Sciences de la Vie, de la Terre, de l'Univers, de l'Environnement reposent sur des modèles, des représentations de la matière.
Dans l'enseignement secondaire, les premières leçons de Chimie introduisent des notions d’atomistique, de liaisons et d’édifices entre les atomes.
Dans notre vie courante et dans nos premiers apprentissages scientifiques, nous disons de la matière qu'elle est solide, liquide, gazeuse, vapeur, fluide.
Nous savons "parfaitement" faire passer la matière d'un état à un autre : transformer un solide en liquide (exemple : faire fondre un glaçon), transformer un liquide en gaz (à moins que ce ne soit en vapeur ; exemple : faire bouillir de l'eau).
Jusqu'à présent dans ce cours, pour nous représenter la matière, nous avons utilisé notre sens commun et avons pu, sans trop de difficulté de compréhension entre nous, donner un contenu scientifique à des notions aussi tangibles que pression ou température.

Et pourtant,

cette matière donc sommes-nous capables, dans l'état actuel de nos connaissances, d'en parler avec précision ?


1. Introduction : gaz, liquide, solide

Communément, on classe les milieux matériels en solides et fluides
Ces deux notions, comme beaucoup de notions premières, ne sont pas simples à définir, la difficulté augmente si l'on souhaite, comme tout un chacun, distinguer les liquides et les gaz à l'intérieur de la famille fluide.
Il n’est jamais inutile d’ouvrir un dictionnaire et de chercher le sens qui peut être donné aux mots.

Ouvrons (sans en faire publicité) le "Petit Robert" et regardons les définitions à usage courant.

Fluide : "Qui n'est ni solide, ni épais, coule aisément". Mais l'huile, par exemple, c'est épais ou non ? Allons voir à solide.

Solide : "Qui a de la consistance, qui n'est pas liquide, tout en pouvant être plus ou moins mou". Qui n'est pas liquide ? Allons voir à liquide.

Liquide : "Tout corps qui coule ou tend à couler". Peut-on dire que le sable sec qui coule entre les doigts est un liquide ?

Les définitions à usage courant semblent bien floues, aussi dans le même dictionnaire nous considérons les définitions scientifiques.

Fluide : "Tout corps qui se laisse déformer sous l'action de forces minimes; tout corps qui épouse la forme de son contenant"

Solide : "Se dit d'un corps dans lequel les molécules sont très rapprochées les unes des autres et vibrent avec une très faible amplitude autour de leur position d'équilibre; qui a de la cohésion, garde une forme relativement constante lorsqu'il n'est pas soumis à des forces extérieures"

Liquide : "Tout corps à l'état fluide, pratiquement incompressible, formé de corpuscules (ions ou molécules) soumis à de faibles attractions"

Gaz : "Tout corps qui se présente à l'état de fluide expansible et compressible (état gazeux) dans les conditions de température et de pression normales"

Cette lecture permet de dégager quelques pistes :

Sans doute, avons nous l’impression d’en savoir plus, mais pour progresser on devra " prendre un microscope " c'est à dire faire intervenir une conception microscopique de la matière.

2. L’hypothèse atomique (ou moléculaire)

L’hypothèse est banale (universellement admise). Elle était déjà émise par les philosophes de la Grèce antique. Par contre les premières preuves expérimentales - Dalton, Proust, Lavoisier au 19ème siècle - sont relativement récentes.


Si, dans un cataclysme, toute notre connaissance scientifique devait être détruite et qu’une seule phrase passe aux générations futures, quelle affirmation contiendrait le maximum d’information dans le minimum de mots ? N’est ce pas l’hypothèse atomique à savoir " toutes les choses sont faites d’atomes (de molécules), petites particules en agitation incessante, s’attirant mutuellement à petite distance les unes des autres et se repoussant si on cherche à trop les rapprocher ". Dans cette seule phrase vous verrez qu’il y a une énorme quantité d’informations sur le monde, si on lui applique un petit peu d’imagination et de réflexion. The Feynman Lectures on Physics par Richard P. Feynman, Robert B. Leighton et Mattews Sands.

Sans doute, cette phrase de Richard P. Feynman, prix Nobel de Physique en 1965, est suffisante pour aborder un premier cours de Thermodynamique à condition de la compléter par :

Dans un cadre limité à l'enseignement de la Physique, cette phrase est très insuffisante pour comprendre le comportement de la matière soumise à un champ électrique et/ou magnétique, pour aborder l’interaction onde-matière c’est à dire une physique dite " moderne " celle qui ne s’est construite qu’à partir du début du 20ème siècle. Le lecteur intéressé pourra compléter ces connaissances par l'annexe "Les particules de base de la matière" et par l'étude de cours ou de documents de type "Atomistique et Structure"


La compressibilité des gaz, la presque incompressibilité des liquides et des solides permet de dire que les atomes d’un liquide ou d’un solide sont " entassés " les uns sur les autres alors que ceux d’un gaz sont éloignés les uns des autres. Ceci est confirmé par la masse volumique qui est faible (peu d’atomes par unité de volume) pour les gaz et importante pour les liquides et les solides, par le fait que nous nous sentons " léger " (forte poussée d’Archimède) dans l’eau et " lourd " dans l’air, que nous avons du mal à marcher dans l’eau, …

L’état gazeux est un état dilué alors que liquides et solides font partie des états condensés.

3. Les deux états de la matière : l'état désordonné et l'état ordonné

Le sens commun nous fait distinguer trois états de la matière : solide, liquide et gazeux ... sans que nous soyons capables d'en faire les distinguo de manière rigoureuse.
Le modèle atomique de la matière conduit à une séparation des états physiques en deux classes dont le mérite est une coupure plus franche : le première classe est dite à structure désordonnée, la deuxième à structure ordonnée.

3.1. Les états désordonnés

3.1.1 Le Gaz

3.1.1.1. Agitation au niveau microscopique

Les modèles ne sont jamais statiques (ce qui n'est pas en contradiction avec " globalement au repos " au niveau macroscopique).
C'est particulièrement évident pour un gaz où la matière est diluée c’est à dire où les particules sont " libres " de leur déplacement. En effet, si elles n'étaient pas en mouvement, du fait du champ de pesanteur, elles ne pourraient qu'être entassées à partir du fond du récipient qui les contient ou à partir du sol ce qui ne peut manifestement être le cas pour une substance diluée.
Ainsi dans les gaz, s’introduit la notion de mouvement sans cesse des particules, dans toutes les directions au gré des chocs, que l'on appelle agitation. Les particules seront attirées vers les altitudes les plus faibles mais sans pouvoir s'y entasser.
Dans un gaz, les interactions entre particules sont faibles (matière diluée, particules en moyenne éloignées les unes des autres), les mouvements de celles-ci sont assez libres, il règne un désordre, que l'on qualifie de parfait si on néglige toute interaction entre particules.

3.1.1.2. Interprétation microscopique de la pression

Une conséquence de l'agitation est une visualisation locale (au niveau microscopique) de la pression.
La pression est la force moyenne par unité de surface due aux particules venant frapper une paroi.

La pression augmente :
- avec le nombre de chocs contre la paroi donc, dans une enceinte de volume V, avec le nombre N de particules (soit, en fait, avec N/V),
- avec l'agitation des particules puisque la quantité de mouvement transférée de la particule à la paroi sera d'autant plus importante.

Notons l'accord entre le caractère non directionnel de la pression et le fait que le mouvement des particules ait lieu dans toutes les directions.

De même pour que la pression tende vers une valeur nulle (comportement limite de tous les gaz réels appelé gaz parfait), il convient que le nombre de chocs soit faible, c’est à dire que la densité des particules soit faible (gaz raréfié), c’est à dire qu’en moyenne elles soient éloignées les unes des autres, donc que les interactions entre les particules soient négligeables. La probabilité pour que deux particules entrent en collision est extrêmement faibles, chaque particule rebondit d'une paroi à une autre.

3.1.1.3. Mélange idéal de gaz parfaits

Dans une enceinte de volume V, nous plaçons différentes substances chimiques en phases gazeuses sans possibilité de réactions chimiques entre elles. A cause de l'agitation les substances se mélangent, le mélange est dit idéal.

Si p la pression du mélange est suffisamment faible, l’expérience montre que :
est le nombre de moles du gaz i et n le nombre total de moles gazeuses sans distinction de la substance gazeuse.

Le mélange se comporte comme un gaz parfait.
Si le gaz i était seul dans l’enceinte, il se comporterait comme un gaz parfait et sa pression serait donnée par la relation .
On remarquera que la pression p dans le mélange est liée aux pressions par la relation .
est appelée pression partielle du gaz i dans le mélange. La pression du mélange est la somme des pressions partielles.
On appelle fraction molaire du gaz i dans le mélange, la quantité .
On déduit que .
La quantité représente la masse totale du mélange si est la masse molaire du gaz i.
On définit la " masse molaire du mélange " par .

Autre écriture de l’équation d’état des gaz parfaits

pV = nRT s’écrit aussi pV = (m/M) RT = mrT où r = R/M.
Si N est le nombre de molécules du gaz, N = nNN est le nombre d’Avogadro.
PV = nRT pV = NkT où k = R/N = 1,38 10-23 est la constante de Boltzmann.
L’équation d’état des gaz parfaits s’écrit encore en introduisant la densité volumique molaire et la densité volumique des molécules.
Remarque : localement la pression est proportionnelle à la densité des molécules

Masse volumique et densité des gaz parfaits

Soit m = m/V la masse volumique. On obtient (autre écriture de l’équation d’état des gaz parfaits).
On appelle densité d’un gaz le rapport de la masse d’un certain volume de gaz sur la masse du même volume d’air pris dans les mêmes conditions de pression et de température.

3.1.1.4. Facteur de Boltzmann. Raréfaction de l'air

Nous traitons là un exemple de statique des fluides compressibles.
Nous cherchons à savoir comment varie la pression p avec l’altitude z. Nous formulons l’hypothèse justifiée que l’air est un mélange idéal de gaz se comportant comme un gaz parfait (nous savons que la pression est de l'ordre de 1 atmosphère au sol et diminue avec l'altitude) et celle fausse dans la troposphère (altitude comprise entre 0 et 20 km) que la température est la même quelque soit l’altitude.
Soient la température et la masse molaire de l’air.
Nous utilisons le principe de l’hydrostatique dp = -mg dz et l’équation d’état des gaz parfaits.

A température uniforme, la pression est proportionnelle à la masse volumique ainsi qu’à la densité volumique molaire. On obtient :

représente la masse " moyenne " d’une molécule d’air et est l’énergie potentielle dans le champ de pesanteur terrestre de la " molécule d’air " à l’altitude z.

Cette application nous explique le phénomène de raréfaction de l’air avec l’altitude, à savoir la densité moléculaire diminue avec l’altitude suivant une fonction dépendant de l’énergie de la molécule à cette altitude et de la température.

La fonction appelée facteur de Boltzmann est d’une importance considérable en Physique statistique.

Dans l'exemple considéré, elle s’interprète de la manière suivante :
le rapport est la probabilité de présence d'une molécule à l'altitude z. Si, pour une altitude, ce rapport est égal à 1/2, ceci veut dire qu'il y a deux fois moins de molécules à cette altitude qu'à l'altitude de référence ou, dit différemment, que la probabilité de présence d'une molécule à l'altitude z est 50% de celle de la trouver à l'altitude de référence.

3.1.1.5. Température cinétique. Equipartition de l'énergie. Energie d’un gaz parfait

La distribution des vitesses des centres de masse des molécules d’un gaz parfait en équilibre à température T vérifie le facteur de Boltzmann c'est à dire que le nombre de particules dont le centre de masse a une composante de vitesse est proportionnelle à

Ce résultat est connu sous le nom de loi distribution des vitesses de Maxwell-Boltzmann et entre dans le cadre de la théorie cinétique du gaz parfait (voir Annexe)
Résultat des travaux de Maxwell et de Boltzmann à la fin du 19ème siècle, elle a été validée expérimentale par les expériences sur les " jets monoatomiques ". Il convient de citer la première en 1947 de Estermann, Simpson et Stern et celle très convaincante réalisée en 1959 par Marcus et McFee.

Nous retiendrons deux résultats fondamentaux :

Suivant ce résultat, la température est une mesure de l'agitation (on parle d'agitation thermique ou de température cinétique).

Ce résultat est général en Physique et constitue le théorème d'équipartition de l'énergie.

Remarque : en remplaçant dans l’équation d’état du gaz parfait, on obtient relation tout à fait cohérente avec l’interprétation microscopique de la pression.

Energie interne d’un gaz parfait

L’énergie interne d’un gaz parfait est constituée des énergies cinétiques des molécules dans leur mouvement et de la somme (que nous notons des énergies internes à chaque molécule. Les énergies d’interaction entre molécules sont négligeables (état raréfié).

Pour un gaz monoatomique de N molécules où l’énergie cinétique des molécules est l’énergie de translation du centre de masse, on obtient : qui correspond à la décomposition d’un mouvement de translation quelconque en trois mouvements de translation indépendants (ð 3 degrés de liberté).

En Calorimétrie, on accède par la mesure à la quantité appelé capacité calorifique à volume constant.
Le graphique ci-après montre, pour une mole de gaz monoatomique à pression faible, des résultats tout à fait conformes à la théorie (sauf aux très basses températures).
Pour les gaz polyatomiques, les résultats expérimentaux sont plus complexes : pour les diatomiques, la capacité calorifique molaire à volume constant est nulle à 0 K, elle atteint la valeur à partir de 2-3 K, puis à partir de 150 K, à très hautes températures.

Pour expliquer ces augmentations des valeurs de la capacité calorifique, il faut ajouter des sources d’énergie : énergie de rotation des molécules correspondant à deux degrés de liberté (deux rotations indépendantes) et l’énergie de vibration des atomes constituant les molécules (deux degrés de liberté correspondant à de l’énergie cinétique et à de l’énergie potentielle). On trouve donc une énergie supérieure à celle trouvée pour un gaz monoatomique.
Pour des molécules d’atomicité supérieure, les résultats expérimentaux se compliquent mais l’interprétation en termes d’énergie de translation, de rotation et de vibration demeure.
Remarque : on ne peut comprendre les évolutions de avec la température sans notion de mécanique quantique et de quantum d’énergie.

3.1.2. Le liquide

Agitation thermique dans les liquides

La notion d'agitation est moins évidente puisqu'un liquide est entassé au fond du récipient. Remarquons cependant que si nous mettons deux liquides miscibles dans un récipient, spontanément ils diffusent c'est à dire ils se mélangent de manière à former un liquide homogène.
Donc pour le liquide, le modèle statique au niveau microscopique n'est pas possible. Les molécules de liquide sont soumises à l'agitation thermique, leurs mouvements ne sont pas libres comme dans un gaz car elles sont proches les unes des autres (les liquides ont des masses volumiques importantes et constituent des milieux denses, condensés)

Un liquide est un état moins désordonné qu'un gaz.

Beaucoup de molécules encastrées entre leurs voisines ne peuvent que vibrer. Il peut arriver qu'une molécule puisse s'échapper et échanger sa position avec une autre : c'est l'origine du phénomène de diffusion.
Pour les liquides, il n’y a pas de résultats (ni de théories) simples

La viscosité des liquides

Quand un liquide n'est pas en équilibre au fond d'un récipient, il coule. Les molécules glissent les unes sur les autres, elles sont maintenues en une masse compacte de volume constant par les forces de cohésion interne qui n'empêchent pas la forme extérieure du liquide de se modifier. Si le glissement est facile, le liquide est dit fluide et la viscosité est faible. Si la viscosité est très élevée, le liquide ressemble à un solide mou. La viscosité est très sensible à la température.

3.1.3. Le solide amorphe

Le cas typique est celui du verre qui, à température ordinaire, a l'apparence d'un solide très dur et indéformable. Lorsqu'on augmente la température, il fond sans qu'il y ait discontinuité dans les propriétés physiques (transition progressive), c'est à dire sans qu'il y ait de changement dans la structure atomique.
C'est un cas rare de solide appelé solide amorphe ou vitreux où l'état solide est en fait un état liquide (donc une structure désordonnée) de viscosité très élevée.

3.2. L'état ordonné : le solide cristallisé

Pour l'immense majorité des corps purs, la transition solide-liquide est discontinue et se produit à température fixe pour une pression déterminée : suivant le sens, elle est appelée fusion ou solidification.
Il existe aussi une transition discontinue solide-gaz : suivant le sens, c'est la sublimation ou la condensation.

Les solides (à l’exception des solides amorphes) ont des structures ordonnées. On parle de solide cristallisé avec des maillages périodiques, des " empilements " réguliers. C’est le domaine de la cristallographie.

On distingue quatre types de solides cristallisés.

L’énergie d’un solide est constituée de la somme des énergies de vibration (autour de leur position d’équilibre) des particules de base (ions, atomes ou molécules) et de la somme des énergies internes des particules de base.
Si la particule de base est un atome ou un ion simple, on obtient, si la température est suffisante, .
Ce résultat est connu sous le nom de loi de Dulong et Petit

Remarque : entre ordre et désordre

Dans un souci de clarté, nous avons distingué l'état ordonné et l'état désordonné.
En fait, la situation est parfois plus complexe et on parle de structures mal cristallisées ou douées d'un ordre cristallin partiel : dans cette catégorie, on range les hauts polymères (plastiques), beaucoup de substances essentielles à la constitution de nos organes et les cristaux liquides.

4. Changements de phases (d’état) des corps purs

4.1. Introduction

Le schéma ci-après donne la nomenclature des divers changements de phase (on dit aussi changements d’état ou transitions de phase) entre les états solide, liquide et gazeux.

Il convient d’être précis avec le terme condensation.
Il s’agit du passage de l’état dilué ou raréfié (gazeux ou vapeur) à un état condensé (liquide ou solide). Pour être clair, on devrait préciser, condensation à l’état liquide ou condensation à l’état solide.
Souvent pour le passage à l’état liquide, on emploie l’expression liquéfaction lorsqu’il s’agit d’un gaz et l’expression condensation lorsqu’il s’agit d’une vapeur.

4.2. Observation courante

L’expérience courante de transitions de phase consiste à fournir de l’énergie thermique à un solide à pression constante.
Sa température augmente, puis il fond (la température reste constante durant la fusion).
Lorsque le corps est entièrement liquide, sa température recommence à augmenter, puis il bout (sa température reste constante durant l’ébullition).
Lorsque le corps est gazeux, sa température recommence à augmenter.
Par refroidissement, on peut faire l’expérience inverse, en passant par les stades de condensation et de solidification.

4.3. Equilibre liquide-vapeur

Etude expérimentale, courbe de saturation

Aux températures inférieures à la température critique TC , la compression isotherme d’un gaz provoque sa liquéfaction, cependant nous devons nous situer à des pressions supérieures à la pression pt du point triple où coexistent les états solide, liquide et gazeux.
Si, à partir d’une pression faible où l’état est gazeux, on veut réduire le volume, il faut augmenter la pression (un gaz est facilement compressible). A un certain niveau de pression que nous nommons pression de vapeur saturante pV , il apparaît une première goutte de liquide facile à distinguer et, à partir de là, on peut réduire le volume sans augmenter la pression. On constate que, dans l’enceinte, il y a de plus en plus de liquide. Lorsqu’il n’y a plus que du liquide, il faut exercer des augmentations de pression très fortes pour réduire le volume (un liquide est, en première approximation, incompressible).
Il est possible de faire le processus expérimental inverse en réduisant les pressions. On part de l’état liquide compressé. Lorsqu’on atteint la pression de vapeur saturante, il apparaît dans l ’enceinte la première bulle de gaz (le liquide se met à bouillir). Tant que le liquide est en ébullition, la pression reste constante, le volume augmente et il y a de plus en plus de gaz. Lorsqu’il n’y a plus que du gaz, il faut réduire la pression pour augmenter le volume.

Les faits expérimentaux sont repré-sentés pour différents niveaux de température tels que :
L’ensemble des points E est l’ensemble des points où apparaît la première bulle gazeuse : ils forment la courbe d’ébullition.
L’ensemble des points R est l’ensemble des points où apparaît la première goutte de liquide : ils forment la courbe de rosée.
La courbe de saturation est formée de la courbe d’ébullition et de la courbe de rosée.
Le point C, point supérieur de la courbe de saturation est appelé le point critique.

Ainsi pour des températures supérieures à la température TC du point critique, un corps ne peut exister qu’à l’état gazeux.
La courbe de compression isotherme, pour la température critique, présente au point critique un point d’inflexion, la tangente y est horizontale.

En ce point, le corps pur obéit à son équation d’état, à et à .
Une interprétation du point critique à partir de l’équation d’état de Van der Waals donne :
La mesure des coordonnées du point critique fournit des renseignements sur l’aspect microscopique de la matière.

Coordonnées du point critique de quelques corps

Corps

TC en K

pC en atm

Corps

TC en K

pC en atm

Air

132,4

36

Méthane

190,2

45

CO2

304,1

71

O2

154,2

49

N2

125,9

32

Propane

370,6

39

Butane

426,3

35

H2

32,1

19

He

5,2

2,3

H2O

647,3

218

Isobutane

406,8

36

     

Vapeur sèche, vapeur saturante, liquide saturant

A une température donnée, le changement d’état liquide-gaz se produit à la pression pV dite pression de vapeur saturante. Cette pression est inférieure à la pression critique et supérieure à celle du point triple.

La pression pV ne dépend que de la température .

Un corps à l’état gazeux devient liquide par compression isotherme lorsqu’il atteint la pression de vapeur saturante. Inversement un corps liquide devient gazeux par détente isotherme lorsqu’il atteint la pression de vapeur saturante.

A des températures supérieures à la température critique, un corps est toujours gazeux quelque soit la pression.

Rappelons que l’état gazeux à des températures inférieures à la température critique (qui devient liquide par compression isotherme) est appelé vapeur sèche d’où le vocabulaire changement d’état (ou transition de phase) liquide-vapeur.
Dans le langage courant, on dit le gaz oxygène, le gaz azote et la vapeur d’eau.
La vapeur sèche jusqu’à sa limite où elle atteint la pression de vapeur saturante (elle est alors appelée vapeur saturante) obéit aux mêmes équations d’état que les gaz, en particulier à pressions suffisamment faibles l’équation d’état des gaz parfaits est adaptée.
Lorsque la pression d’un liquide est celle de la vapeur saturante, il est appelé liquide saturant.
A l’intérieur de la courbe de saturation, nous avons, à la pression de vapeur saturante, un " mélange " de liquide saturant et de vapeur saturante que nous appelons vapeur humide.
Liquide saturant et vapeur saturante pris seuls obéissent, en un point donné, aux équations d’état du liquide ou de la vapeur sèche dont ils sont la limite ; par contre, la vapeur humide a un comportement tout à fait différent et l’équation d’état est .

Vaporisation dans le vide

Nous introduisons dans les tubes des liquides différents.
Ils se vaporisent, entièrement si les quantités introduites sont faibles, partiellement si les quantités introduites sont suffisantes (la pression est alors la pression de vapeur saturante).
Les dénivellations par rapport au tube de référence sont différentes, la pression de vapeur saturante dépend du corps.
A 20 °C pour l’éther, l’alcool et l’eau, on obtient respectivement des pressions de vapeur saturante de 442, 44 et 17,5 mm de mercure.

Vaporisation en atmosphère gazeuse

Contrairement à la vaporisation dans le vide qui est " instantanée ", la vaporisation dans un environnement gazeux est un phénomène lent.
La pression d’un mélange gazeux contenant plusieurs constituants dont certains sont dans des conditions de saturation est égale à :

Le premier terme représente la somme des pressions partielles des divers gaz et vapeurs sèches, le second terme la somme des pressions des vapeurs saturantes.

Applications du changement d’état liquide-vapeur

L’étude des machines thermiques nous montrera l’importance du changement d’état liquide-vapeur.

Dans ce paragraphe, nous citerons :

4.4. Equilibre liquide-solide, équilibre solide-gaz

Les phénomènes de transitions de phase liquide-solide et solide-gaz sont analogues à ceux que nous avons étudiés pour la transition liquide-vapeur.
Cependant, pour ces équilibres, il n’y a pas de point critique.
Le phénomène de fusion est courant, celui de sublimation moins car la pression doit être inférieure à celle du point triple.

Dans les conditions ordinaires, nous citerons,

Courbes de sublimation, de fusion, de vaporisation. Point triple

Dans un diagramme T, p traçons les trois courbes d’équilibre solide-gaz ou courbe de sublimation, liquide-vapeur ou courbe de vaporisation, liquide-solide ou courbe de fusion.
Ces trois courbes se coupent nécessairement en un même point appelé point triple t .
Au point triple, il y a coexistence des trois phases solide, liquide et gazeuse. Si nous faisons varier soit la pression, soit la température soient ces deux paramètres à partir du point triple, il y a disparition d’une ou deux phases.

La sublimation ne peut se produire pour des pressions supérieures à celle du point triple.
La courbe de fusion est toujours très proche de la verticale, généralement de pente positive. Dans le cas de l’eau, elle est négative ce qui explique l’expérience amusante du " regel de l’eau ".
La courbe de vaporisation est limitée par le point critique C et le point triple t. Certaines formules à caractère empirique plus ou moins marqué donnent de bonnes représentations de .
Nous citerons, la formule de Dupré , celle de Rankine , celle de Duperray valable pour l’eau entre 100 °C et 200 °C à savoir où la pression est en atmosphères et la température en Celsius.

Enfin, au risque de nous répéter, nous croyons important d’insister :

Il y a continuité de l’état gazeux et de l’état liquide, ces deux phases appartiennent à un même état appelé fluide et diffèrent par une plus ou moins grande densité des molécules.

Il ne faut donc pas s’étonner que les liquides obéissent à des équations d’état de même type que les gaz.

 

 

 

La figure ci-contre représente les transitions de phase solide, liquide et gaz dans un diagramme p, V .

4.5. Remarque

Les changements de phase des corps pur s’accompagnent d’échanges d’énergie considérables.

Cet aspect sera abordé dans un chapitre ultérieur sur l'étude énergétique des changements de phases.

Représentation dans un espace à trois dimensions ( p, V, T ) des trois états de la matière d’un corps pur